INSTANT DE NATURE 17 Les coquelicots de mon jardin
Alors que s’éveille un nouveau jour
Un nouveau destin
Que les corolles légères sont prêtes de la nuit
Pour les noces du matin
Avec les bourdons d’hier
Que les boutons se préparent pour celles de demain
Qu’on a oublié la fin de l’été de l’année dernière
Que les premiers bourdons noirs et blancs
Arrivés de nulle part
Plongent dans les étamines
Pour des coïts poudrés et frénétiques
Saccageant le sage rangement de la nuit
Puis s’envolent
Petits dieux ahuris bruyants bourdonnants
Vers d’autres orgies
Que cette ruine est joyeuse et légère
Que nulle gravité ne pèse ici
Qu’on s’en fout de ce qui apparaît et disparaît
Que tu fais une ptite poésie des coquelicots de ton jardin
Que tu ferais mieux de te taire
Qu’il y a une place pour toi
Dans cette fête panique
Pourvu que tu t’effaces
Que tu te taises
Que tu t’offres
Toi aussi
C’est la voie du coquelicot de Bretagne Nord
Elle t’enseigne que rien n’est grave
Profond et léger, oui
Relié
Aux coquelicots de ton jardin
Et aux bourdons noirs et blancs
Qui sont repartis
On ne sait où
La voie du détachement
Du silence
Et de l’émerveillement